Septembre 2023 ~ A l’aube d’une nouvelle vie

Un mois, cela fait déjà plus d’un mois que je suis parti ? Le temps passe si vite ! Vous vous en êtes sûrement rendu compte mais je suis en retard ce mois-ci… Il est vrai que je pourrais me trouver beaucoup d’excuses mais la vérité est que je m’y suis pris au dernier moment ! Certes cela avait un certain goût de nostalgie me rappelant mes études supérieures où nous avions su devenir experts du travail rendu à la dernière minute, néanmoins j’aurais préféré vous écrire l’article en temps et en heure. Il va donc falloir que je rédige davantage en amont car les deux seuls articles écrits jusqu’à aujourd’hui ont été rédigés en moins de 48h.

Les adieux

Je pressentais qu’il me serait dur de dire au revoir à tout le monde et c’est pour cela que j’ai – le plus possible – essayé de prévoir et anticiper ces au revoir. Cependant, le jour du départ alors que je m’apprêtais à franchir la douane et j’ai ressenti d’une façon très vive l’émotion sur les visages de ma famille et ce fut assez complexe à appréhender pour moi. Davantage que la tristesse de me voir partir loin et donc pour moi d’être séparé d’eux, il y avait dans leurs yeux cette crainte, que je comprends, que ces au revoir ne puissent être des adieux.

Bien qu’il ne s’agisse « que » d’une ou deux années je n’ai pas la prétention – ni la capacité – de vouloir arrêter le temps en France, je serai donc de fait absent pour nombre d’évènements familiaux. Tant les anniversaires, les joies, mais aussi les peines, les difficultés… Moi qui ai toujours eu du mal à lâcher prise, à m’abandonner dans la Providence, cela m’est donc salvateur dans un sens, mais difficile à vivre au quotidien.

La douane passée je fus quelque peu paralysé par ce qui m’attendait. J’avais encore en tête les visages emplis d’émotion de mes parents. Le vol fut donc compliqué, à la fois du fait de mon état émotionnel mais également car je n’ai pu dormir durant les quatorze heures de vol.

Les premiers jours

Je suis donc arrivé le samedi 2 septembre 2023 à 8 heures au Japon. 8 heures, en ayant pas dormi donc depuis plus d’une trentaine d’heures. Je prends ainsi un taxi, remboursé car l’aéroport étant à plus de soixante kilomètres cela revient à un prix vraiment élevé mais je ne pouvais faire autrement car j’avais quatre valises ! J’arrive donc à mon hôtel à Yokohama vers dix heures et demie lorsqu’à mon grand désespoir je comprends que je ne peux pas faire de sieste car il est trop tôt, je dois attendre que la chambre soit disponible.

Je me suis donc retrouvé dans les rues de Yokohama à errer sans but si ce n’est de tuer le temps. Vous savez combien je suis sensible au manque de sommeil et que cela affecte grandement certes mon humeur mais aussi comment je me sens physiquement. J’étais par ailleurs très frustré de passer ces premières heures au Japon de cette façon, sans profiter de l’instant, sans savoir m’émerveiller de ce que j’attendais depuis quatre ans ! Finalement, au détour d’une rue je me suis retrouvé nez à nez avec un temple shintoïste encastré entre des buildings. Face à cette vue tout à fait japonaise, ma frustration s’est apaisée et j’ai su me décider à passer le temps qu’il me restait dans un café pour attendre dans de meilleures conditions.

L’installation

J’ai donc séjourné pendant deux semaines à l’hôtel en attendant de pouvoir emménager. Dès le dimanche de mon arrivée j’avais pu visiter, avec l’agent immobilier de mon entreprise, divers appartements et ainsi trouver le mien. Finalement, en souhaitant profiter de mes week-ends au travers de musées, mais également de balades, de sorties, je me suis mis dans une situation ou pendant plusieurs semaines je n’arrivais pas à meubler complètement mon appartement. L’une des conséquences a été tout d’abord de ne pas pouvoir me faire des repas soi-même pendant longtemps donc une obligation d’aller constamment au restaurant. Certes au Japon ce n’est pas tant un problème économique, mais parfois il est plus agréable de dîner chez soi davantage que de devoir ressortir pour dîner. De plus en attendant de recevoir mon lit j’ai été contraint de dormir pendant deux semaines sur un futon (il s’agit d’un matelas japonais qui est assez fin et est posé à même le sol).

Le confort n’a donc pas été le mot d’ordre du début de mon installation. J’ai meublé par la suite mon appartement avec Ikea, Amazon, Nitori (un magasin de mobilier du même style qu’Ikea mais davantage concentré sur le marché Japonais) et un site internet sur lequel j’ai pu acheter mon électroménager en seconde main. Je pense vous faire une présentation de mon appartement le mois prochain lorsque j’aurai fini de le meubler et de le décorer.

Le VIE

Mais dans tout ça comment se passe mon travail? Et puis qu’est-ce que réellement je vais être amené à faire? Enfin l’ambiance de travail est-elle bonne, le management à la Japonaise pas trop effrayant?

Ce sont les questions qui m’ont été le plus posées et qui correspondent aussi à des interrogations personnelles. J’y ajouterai surtout « suis-je à la hauteur, ai-je les compétences requises ? ». Effectivement, il a pu vous paraître que j’étais très confiant sur ce plan là mais j’étais en réalité le plus inquiet. J’ai cette fâcheuse tendance et habitude de paraître confiant pour ne pas provoquer d’inquiétude tant chez mes proches que chez moi !

Bon. Pour être honnête avec vous je n’ai pas aujourd’hui de réponses définitive à vous apporter vis à vis de ces questions mais j’ai pu me rassurer et, surtout, commencer à m’épanouir !

Le management à la Japonaise

Beaucoup de fantasmes sont présents autour de ce qu’est l’entreprise japonaise et son management. Cependant, comme souvent, nous sommes effrayés par ce que l’on ne connaît pas. De plus, je crois profondément que l’image donnée par Amélie Nothomb dans Stupeur et tremblements correspond à ce que l’écrivain a ressentie mais qu’il ne faut pas en créer une généralité du fait de notre méconnaissance sur la civilisation Japonaise. Si je parle de ce livre c’est parce que l’imaginaire collectif français c’est grandement appuyé sur ce dernier au sujet des entreprises japonaises. Alors certes le Japon possède des entreprises qui sont réputés pour exploiter leurs salariés mais il ne s’agit que de certaines. Pour m’être vraiment beaucoup renseigné sur la culture et la société japonaise, je me suis vraiment rendu compte d’à quel point il est nécessaire de ne pas juger une coutume ou une façon de faire japonaise avant d’y avoir décelé toutes les nuances. Je pense surtout qu’il faudrait davantage laisser la parole à ce qui y travaille aujourd’hui pour davantage comprendre cette situation.

C’est donc pourquoi je vais m’arrêter là sur ce sujet car… Je ne suis pas dans une entreprise japonaise ! Faurecia est une entreprise française donc je ne peux pas connaître ce sujet tellement plus ! A vrai dire il y a même davantage d’étrangers que de japonais dans mon département. De plus, du fait de la présence de plus d’une dizaine de VIE européens j’ai pu réaliser une intégration éclair !

Pour ce qui est du management je pense déceler déjà des différences avec la France mais surtout vis à vis des japonais. La façon de travailler, de réfléchir, étant différente un management différent est nécessaire.

L’équipe VIE Faurecia, Kanpai !

Mes missions

Etant diplômé en génie électrique et automatique, mes responsabilités se sont naturellement définies autour de l’électronique. Je suis entouré ici d’ingénieurs en mécanique, mon rôle repose essentiellement à réussir à leur apporter mon aide sur les sujets impliquant de l’électronique. Mis à part cela je suis le pont entre les équipes de Recherche et Développement en France et en Pologne, et l’équipe ici au Japon sur la plupart des sujets d’innovation.

Avec ces sujets j’ai été envoyé en voyage d’affaire par deux fois déjà, à Hiroshima et dans la préfecture de Tochigi pour voir respectivement Mazda et Honda. En somme dès le premier mois j’ai eu l’opportunité de continuer à vivre mon rêve mais en plus grand ! Je vous avais témoigné du fait que j’ai toujours souhaité pouvoir être amené à travailler au Japon grâce à mes compétences, mais qu’on me fasse suffisamment confiance pour y faire des déplacements professionnels, quelle joie !

Etre à la hauteur

Finalement ce premier mois m’aura fortement rassuré. J’ai su m’épanouir avec l’aide de mes collègues, et j’ai pu me plonger dans un travail avec joie et entrain. Quel bonheur de travailler sans subir mais en appréciant ! Ainsi lorsque tout récemment mon manager m’a à plusieurs occasions, en privé comme en public, affirmé que je faisais du bon travail et il était fier de moi… Quelle joie ! C’est alors que j’ai compris. J’ai compris que plus que d’être soulagé j’étais motivé, j’ai compris que c’est essentiel lorsque l’on a la responsabilité de personnes de savoir ce qu’elles font pour pouvoir les féliciter légitimement, j’ai compris que je pouvais avec confiance aborder ce VIE.

Les voyages et découvertes

J’ai ce mois-ci bien plus voyagé que ce que j’avais cru possible. Même en mettant de côté les voyages d’affaires, je suis allé pêle-mêle faire du surf dans la préfecture de Chiba, puis je suis allé à Nagoya pour voir le grand prix de Formule 1 à Suzuka, mais également j’ai récolté du riz à Chiba !

J’ai été amené ce mois-ci à découvrir beaucoup de choses différentes et je pense que ce qui a été pour moi le plus intéressant fut les réunions japonaises. Alors ça ne vend pas du rêve dit comme cela donc je vais préciser. Je parle des réunions entre deux entreprises différentes et où l’enjeu est important. J’ai découvert toute une « étiquette » tout à fait complexe ! Ne l’ayant pas à ce jour maîtrisé je ne vais pouvoir vous décrire que ce que j’en ai perçu.

Tout d’abord, l’échange des cartes professionnelles. Là où en France cela n’existe pratiquement plus, au Japon c’est impensable de ne pas en posséder ! Tous les participants de la réunion s’échangent donc leurs cartes, en s’inclinant dans un premier temps, puis en tendant des deux mains sa carte tout en se présentant.

Ensuite viens le placement. Les personnes les plus importantes sont, par opposition avec les moins importantes, les plus loin de la porte et les mieux assis.

La prise de parole. C’est très rarement le plus gradé qui parle, mais toujours son associé. C’est donc très déconcertant car celui qui prend la décision finale ne participe que très peu à la discussion !

L’attitude non verbale. J’ai par exemple été tout à fait pris de court lorsque le manager de l’entreprise cliente à commencé à dormir devant moi en pleine réunion ! Je me suis logiquement demandé à quel point c’était utile de perdre une journée entière pour une personne qui ne nous respecte pas et qui n’est vraisemblablement pas intéressé. Pourtant ce manager semblait si poli et respectueux, comment a-t-il pu en l’espace de cinq minutes devenir aussi irrespectueux surtout lorsque c’était la partie la plus complexe de la réunion ? Là est la subtilité. En réalité personne n’a jamais dormi lors de cette réunion, c’est une habitude culturelle que de fermer les yeux pour mieux comprendre et mieux se concentrer sur ce qui est dit. Mais c’est là que j’ai compris à quel point on peut se méprendre sur une réunion si l’on ne connaît pas les différences culturelles !

Le contenu verbal de la réunion. Bon… Je ne parle pas Japonais donc je n’ai rien pu comprendre, mais j’ai appris d’un Japonais qui faisait parti de la réunion avec nous que même certains Japonais ne comprennent pas ce qui est dit. En effet, on y parle avec des nuances et des subtilités qu’une personne non initié ne peut comprendre, ou bien complètement de travers.

Mes engagements

Ces deux dernières années en France j’ai réalisé à quel point il était important pour moi de m’engager au quotidien et de vivre ma foi. Ainsi à Toulouse j’ai reçu la grâce de pouvoir me former et d’appliquer au travers d’engagements divers. A la suite des JMJ de Lisbonne je n’avais qu’un désir, offrir de mon temps au Japon pour transmettre, témoigner.

Après avoir rencontré la communauté francophone catholique de Tokyo j’ai été surpris des propositions car elles ne correspondaient pas à ce que j’attendais. En effet, tel un bon écolier je m’attendais à appliquer ce que je savais parfaitement comme dans le manuel que j’avais appris. La réalité est fort heureusement différente. J’ai donc accepté de m’engager avec d’autres auprès de l’aumônerie des lycéens. J’ai par ailleurs également accepté d’aller sur une journée aider les chefs scouts lors d’une sortie.

On a toujours une image différente entre ce que l’on pense de ce nous attend par rapport à la réalité. On a une certaine vision sur ce que l’on souhaite pour nous-même, et ce avec ce que l’on se pense capable de faire. Cependant, je crois fermement que le bonheur ne réside pas dans le fait de rester constamment dans ce que l’on sait faire, en enterrant nos capacités, notre talent. Je suis persuadé qu’on ne peut atteindre le bonheur qu’en voyant les fruits de ce que l’on a reçu et fait fructifié.

Ainsi, lorsque l’on m’a proposé d’être chef scout pour une troupe laïque, j’ai été décontenancé et n’ai pas su quoi faire. Je me suis dit que ce n’était pas fait pour moi et que j’aurai d’autres propositions potentiellement plus adaptées à ce que je sais faire. Ce qui est sûr, c’est que mon temps est limité dans une semaine donc je dois faire des choix. Et j’ai donc dans un premier temps souhaité refuser. Puis, alors que je n’arrivais pas réellement à discerner et que j’ai commencé à rédiger ce paragraphe je me suis remémorer un passage du livre que je lis actuellement sur Marcel Callo. « Rester chez les scouts est plus attrayant pour moi. Mais c’est choisir la vie facile, sans difficultés […] Si j’écoutais mes goûts, je resterai chez les scouts, pourtant je sais bien que mon devoir m’appelle à la JOC« . Lire cela d’une personne pour laquelle j’ai une profonde admiration ainsi qu’un grand respect m’a aidé à comprendre que je ne pouvais pas refuser. J’ai donc décidé de m’y engager cette année et de voir ce que je peux apporter à ces jeunes.

Merci encore une fois de m’avoir lu ! N’hésitez pas à me faire des retours sur le format et le contenu ! Je n’ai hélas pas l’objectivité nécessaire pour juger par moi-même de la qualité de mon écriture. Je vous présente une nouvelle fois mes excuses pour le retard de cet article. Enfin merci pour tous vos gentils commentaires et messages que vous m’avez envoyé ils m’ont grandement motivé pour vous apporter la meilleure qualité possible !

Par ailleurs, grande nouvelle je rentre pour Noël ! Ce sera pour une dizaine de jours donc si vous êtes disponible pour que l’on se voit j’en serai ravi !

Au mois prochain,

Augustin Duflos de Saint Amand.

8 commentaires

  • Bonne maman

    C est merveilleux de te lire, un grand merci de nous faire partager tout ce que tu vis, je suis admirative.
    Je t’embrasse très fort

  • Oncle Nicolas

    Bravo Tintin et merci pour ce fil qui vise à nous faire partager ton expérience. J’ai adoré la description de la réunion – et oui en Asie pour donner de l’importance à un speech d’un visiteur – nous fermons les yeux pour marquer une concentration maximum. Un héritage de la méditation sans doute ! Dis tintin, suis preneur d’un fil bi mensuel plutôt que mensuel ! Bon séjour dans ce pays si beau et si différent !
    La saison des érables rouges a t elle debute ?

    • Augustin

      Merci oncle Nicolas pour votre précision qui me permet de comprendre d’avantage ce continent si fascinant ! Pour ce qui est du rythme j’ai fait l’inverse ce mois-ci donc je vais essayer de maintenir le rythme mensuel surtout ahah !

  • Titaude

    Tellement chouette de te lire et de voir que tu t épanouis et t adaptes aussi rapidement !!!
    Merci de nous faire voyager !!!
    Jtb

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